Jeu excessif et santé

Informations relatives à la poursuite de l’engagement de la Française des Jeux auprès du Centre de Référence sur le jeu excessif.

Le Centre de Référence sur le Jeu Excessif (CRJE) qui est dirigé par le Professeur J.L Vénisse, Directeur du Pôle Universitaire d’addictologie et de Psychiatrie et responsable du Département de Recherche et de Formation sur les addictions Comportementales au CHU de Nantes, a pour vocation de développer et de diffuser la connaissance dans le domaine du jeu pathologique et de former les intervenants français en addictologie (médecins, personnels socio-éducatifs, psychologues, infirmiers, etc.), en faisant également appel aux meilleurs experts internationaux.

La Française des Jeux poursuit son engagement auprès du CRJE

Le centre de référence sur le jeu excessif (CRJE) du CHU de Nantes se réjouit de la poursuite pour les cinq prochaines années de l’engagement de la Française des Jeux à ses côtés.

Fort des soutiens mobilisés, le Centre de Référence sur le Jeu Excessif a, à titre d’exemples :
– Formé près de 300 professionnels de santé en deux ans.
– Développé un réseau national regroupant la plupart des équipes déjà engagées dans des actions de prévention et de soin du Jeu pathologique.
– Mis en place une étude de suivi de joueurs pathologiques sur 5 ans dans le cadre d’un projet hospitalier de recherche clinique national sur plusieurs centres.

Ce soutien financier est essentiel pour la poursuite des activités du centre, à différents niveaux, en toute indépendance.

Les addictions comportementales, encore appelées addictions sans drogue, plus récemment décrites que les addictions plus classiques à des substances psycho-actives, représentent un enjeu majeur en terme de recherche aussi bien que de prévention et de soins.

Le congrès international organisé à la Cité des congrès de Nantes les 6, 7 et 8 octobre prochain doit permettre de faire le point sur les travaux en cours dans ce domaine.
Ce communiqué de presse est mis en ligne sur le site internet du CHU de Nantes.

  1. Gambling France
    Arjel, autorité de régulation, jeux de hasard et d’argent sur internet , bilan, sociologie des joueurs en ligne, gambling virtuel, poker, paris hippiques et sportifs on line….

    LE SUCCES DES JEUX D’ARGENT SUR INTERNET : premier bilan, premiers indicateurs, premières typologies.

    Alors que « le pays du poker » – les Etats-Unis – vient d’effectuer une opération liberticide spectaculaire contre le poker en ligne (1), la France poursuit sa politique « d’ouverture maitrisée » en attendant la « clause de revoyure ». Si de nombreuses questions restent en suspend ( fiscalité, taux de retour au joueur, pari à handicap, libre jeu de la concurrence ou régulation économique du marché…) chacun s’accorde à reconnaître le travail accompli, notamment par l’Arjel. Par contre en ce qui concerne les études, la recherche sur le gambling , l’Observatoire des jeux, les pouvoirs publics doivent de notre point de vue revoir leur copie. Ils auront de plus en plus besoin d’analyses sociologiques et d’indicateurs objectifs pour « mener à bien leur Politique des jeux. Les soubresauts qui secouent actuellement l’Observatoire des drogues pourraient en être l’occasion.
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    Jean-Pierre G. Martignoni-Hutin ( sociologue)

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    • L’indicateur de supervision publié dernièrement (2) par l’autorité de régulation des jeux en ligne ( ARJEL) permet de dresser un premier bilan ( statistique et sociologique) pratiquement un an après l’adoption de la loi du 12 mai 2010. Certes ce bilan est inféodé aux quelques chiffres fournis par le régulateur et beaucoup de données manquent ou sont partielles, mais ce n’est pas le rôle de l’Arjel de faire une analyse exhaustive des données qu’elle possède. Ce sera l’une des missions de l’Observatoire des jeux, le jour il sera actif, disposera de moyens et sera pluridisciplinaire.
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    A un premier niveau ce bilan apparaît positif au regard des objectifs initiaux : permettre à ceux qui veulent parier sur internet de le faire dans la légalité, lutter contre les sites clandestins, ouvrir à la concurrence certains jeux d’argent en ligne dont seuls les deux opérateurs historiques avaient le monopole, autoriser de nouveaux jeux sur la toile ( poker notamment et une kyrielle de paris sportifs). Un grand nombre de « comptes joueurs » ont en effet été ouverts : 3,5 millions. Les jeux d’argent sur internet intéressent donc un certain nombre de français. Le gambling virtuel quoiqu’en disent certains actuellement, ça marche et ce n’est sans doute qu’un début. Le fait de savoir si tout ou partie des jeux en ligne illégaux ont été captés par cette libéralisation partielle ( 80 % d’après le Président de l’ARJEL) constitue un autre débat dont nous avons déjà parlé mais qui ne sera pas traité ici.

    • Le premier enseignement objectif et significatif que l’on peut tirer, renseigne sur le comportement des joueurs : tous les comptes ouverts ne sont pas « actifs ». 2,6 millions de Comptes Joueurs Actifs (CJA) depuis l’ouverture, soit 74% du total. Un nombre non négligeable de gamblers on line (26%) apparaît très volage. Ils ont fait la démarche d’ouvrir un compte mais ne l’utilisent pas ou peu. Cela pose de nombreuses questions dont celles de la satisfaction client, de la fidélisation ; problématiques cruciales pour les opérateurs. Vu le manque de recul il est difficile d’apprécier si le marché du gambling virtuel possède une variabilité saisonnière ou intra mensuel ( observable dans les casinos en dur) susceptible d’expliquer aussi cette volatilité. Une chose est certaine, pour les paris « sportifs », cette forte volatilité est à mettre en liaison avec les évènements du même nom et leur médiatisation. Il n’y a pas une coupe du monde de football tous les ans !

    • Deuxième enseignement : une hiérarchie s’est assez rapidement instaurée entre les trois familles de jeux autorisées, en fonction du choix et des préférences des joueurs. Le tiercé gagnant : poker, paris hippiques, paris sportifs.

    • Le succès du poker ( en cash game notamment) apparaît remarquable. Le poker s’est imposé rapidement comme le jeu en ligne favori des français, loin devant les paris hippiques et sportifs, si l’on exclut l’épiphénomène « effet coupe du monde ». Il y a bien en France depuis quelques années déjà un « phénomène poker », confirmé par ailleurs de multiples façons : casinos en dur, cercles, tournois, nombreuses émissions télé, peopolisation & bruelisation, revues dans les kiosques, nombreux sites dédiés, buzz permanent, associations spécifiques… Cet engouement pour le poker – en dur, en ligne et à la télé – ne relève pas d’une simple mode, même si « l’effet nouveauté » a pu jouer. Le poker renvoie à une histoire, une culture, un pays , mais il est désormais devenu un jeu mondial. Il possède une modernité qui s’inscrit dans différents registres : sémantique, symbolique, psychologique. Cette ambivalence – entre histoire et modernité – explique son succès, outre l’intérêt du jeu, ses logiques ludiques, agonistiques, démocratiques. Ce « cercle vertueux culturo-ludique du poker », commencé bien avant la loi, a contribué à préparer le terrain et a fortement profité au poker en ligne. L’évolution est spectaculaire depuis l’autorisation : +160%. 120 000 comptes joueurs actifs à l’ouverture , 312 853 actuellement. La progression est constante, même si une légère décrue apparaît depuis quelques mois. Un pic ayant semble-t-il été atteint en février 2011 , avec 329 529 CJA.

    • Loin derrière les paris hippiques arrivent en deuxième position avec 131 588 comptes actifs ( contre 99 205 à l’ouverture) : + 32 %. C’est un succès pour le monde des courses et la filière cheval. La progression du nombre de comptes joueurs actifs dessine une courbe ascendante, régulière et progressive. On reconnaît là, la constance du turfiste qui, quand il s’engage dans son « travail ludique » ( faire son papier, spectacle des courses, amour du cheval, parier…), le fait dans la durée. Même si un plus haut semble avoir été atteint en février 2011 ( 152 398 CJA) rien n’indique que la légère décroissance observable depuis perdurera. Habitué depuis des lustres à jouer par minitel, téléphone, télé interactive… , de nombreux turfistes ont trouvé naturellement le chemin de l’internet ludique, qui n’était pas tout a fait une nouveauté pour eux. La montée progressive de la courbe du nombre de compte joueurs actifs paris hippiques, soulignent la constance du comportement des turfistes et en final leur passion assumée pour le turf. Les courses, c’est sérieux. Il suffit d’ouvrir une fois Paris Turf, pour comprendre quel labyrinthe ludique elles constituent.

    • A contrario le succès des paris sportifs apparaît plus relatif, si l’on fait abstraction de « l’effet coupe du monde » qui apparaît rétroactivement comme un feu de paille qui n’a duré que quelques semaines. Une « flambée de la flambe » en quelque sorte, vite éteinte par les résultats et les frasques de l’équipe de France. 319 981 CJA à l’ouverture, chiffre tombé très rapidement à 94 888 pour remonter ensuite à 130 00 et atteindre un pic à 167 170 Comptes joueurs actifs en novembre 2011. Actuellement un trou d’air assez spectaculaire est observable pour ces paris : 73026 compte joueurs actifs en avril 2011, 117 864 en mars. Par ailleurs les mises ont baissé de 26,5% au premier 2011 par rapport au dernier trimestre 2010. Mais certains vont peut être un peu vite en besogne en enterrant les paris sportifs à cause de cette récente chute. Peut on comparer des trimestres situés à l’opposé du calendrier, rien n’est moins sur. En outre les paris sportifs avaient déjà connus un plus bas en décembre 2010 ( 84533 CJA), pour remonter spectaculairement fin janvier 2011 (143 201 CJA ) Par ailleurs pendant plusieurs mois, les paris sportifs ont fait mieux que les paris hippiques. Rien n’est joué et personne ne peut prévoir l’avenir. Néanmoins la sociologie des sujets joueurs qui parient sur les compétitions sportives apparaît pour l’instant beaucoup plus hétérogène que celle des deux autres populations. Un grand nombre d’indicateurs ( dont certains imprévisibles : résultat d’une équipe) semblent fortement influer le comportement des gamblers en ligne qui parient sur le sport.

    • Troisième enseignement : le montant des mises engagées par les joueurs. Leur hiérarchie est corrélée aux résultats obtenus en matière d’ouverture de comptes. C’est le poker qui rapporte le plus ( 5 526 millions d’euros en cash game, 683 millions pour les tournois), ensuite les paris hippiques ( 693 millions depuis l’ouverture) et en queue de peloton les paris sportifs (595 millions). Difficile d’en dire plus cependant car « le taux de recyclage » des dépôts en mises est très différent d’un jeu à l’autre. 1 à 3,2 pour les paris hippiques, 1 à 4 pour les paris sportifs, 1 à 8 pour les tournois de poker, 1 à 23 pour le poker cash game.
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    L’indicateur de supervision de l’ARJEL permet également de dresser une « typologie sociologique sommaire » des joueurs en ligne actifs, en fonction de leurs caractéristiques ( âge, genre) ou de leurs comportements

    1 = L’indicateur : âge

    Tranches d’âge Jeux de cercle, poker Paris hippiques Paris sportifs total
    18-24 25 9 41 100%
    25-34 43 17 29 100%
    35-54 28 47 26 100%
    55-64 3 18 3 100%
    65 ans et plus 1 9 1 100%
    total 100% 100% 100%

    La variable âge – objectivement représentative si les conditions de collecte de l’Arjel ne comportent pas de biais – caractérise fortement les trois populations observées. Elle apparaît fortement discriminante et caractérise également les jeux dont il est question.

    ➢ Première enseignement majeur : la population qui joue aux paris sportifs en ligne apparaît nettement plus jeune ( 70 % ont moins de 35 ans dont 41% de 18-20 ) que celles des turfistes ( 26 % seulement ont moins de 35 ans) . Il en va de même dans une moindre mesure pour les joueurs de poker : 68 % ont moins de 35 ans. A contrario en toute logique les turfistes sont essentiellement composée d’adultes matures (74% de 35 ans et plus) dont une population de 65 ans et plus non négligeable ( 9%)

    ➢ Deuxième enseignement significatif : le poids statistique des adultes de 35-54 ans qui jouent au poker ou aux paris sportifs, est pratiquement similaire ( respectivement 28 et 26 %).

    ➢ Le troisième enseignement – assez spectaculaire – souligne que les joueurs les plus âgés ( 55 ans et plus) qui s’adonnent au gambling sur internet, pèsent pour 27 % en matière de paris hippique, alors qu’ils relèvent de l’épiphénomène pour le poker et les paris sportifs : 4%, dont 1% seulement pour les plus de 65 ans.

    Mais ces premières statistiques officielles sur les gamblers en ligne caractérisent aussi indirectement les jeux dont il est question et l’image qu’ils ont aux yeux de l’opinion :

    ➢ Ainsi les paris sportifs apparaissent comme « des jeux jeunes qui attirent les jeunes » et principalement les « jeunes adultes » de 18-24 ans ( 41%). Populations qui s’intéressent aux sports , aux résultats et spectacles sportifs et pratiquent sans doute elle même majoritairement une activité sportive ( et notamment le sport de référence sur lequel elle parie par exemple le football qui représente 54% des mises des paris sportifs).

    ➢ Ainsi le poker apparait également comme une activité ludique – jeune, fun, nouvelle, fortement médiatisée – qui intéresse principalement » les adultes jeunes » et notamment les 25-34 ans (43%). Du coté des « jeunes adultes » – les 18-24 ans – ils s’intéressent également beaucoup au poker et aux tournois de poker ( 25 % de 18-24 ans), avec les risques que cela comporte, mais dans une proportion bien moindre que pour les paris sportifs ( 41% de 18-24 ans)

    ➢ A contrario les paris hippiques ( y compris quand ils s’exercent via le web) semblent conserver l’image d’un jeu réservé à une population mature, à des initiés qui ont accumulé expériences, connaissances et compétences en matière de turf au cours de leur « carrière » de joueurs, et notamment les 35-54 ans. (47%) Si elle possède un revers de médaille ( les jeunes adultes sont peu attirés par les paris hippiques y compris quand ils s’exercent en ligne : 9%), cette image a l’énorme avantage d’attirer également une forte population de seniors – les 55 ans et plus – qui ne semble pas effrayer par la modernité des paris hippiques sur internet, alors que cette même catégorie fuit pour l’instant d’une manière assez radicale le poker et les paris sportifs on line. Le fait que les populations turfistes soient plus âgées voire vieillissantes que les autres populations joueuses, ne signifie donc pas qu’elle soient rétrogrades en matière d’évolution technologique. En final les paris hippiques – un jeu qui a une longue histoire – semblent posséder une base économique, financière, culturelle plus solide que les paris sportifs, activité ludique relativement récente qui a connu de nombreux soubresauts quand la Française des jeux a commencé à les exploiter. Cette base structurelle bien ancrée dans la culture populaire, expliquerait « l’homogénéité progressive tranquille de la courbe des comptes joueurs actifs hippiques », alors que celle des paris sportife constitue une succession de montagnes russes… qui donne mal au cœur à certains opérateurs, au point que certains ont déjà jeté l’éponge.(TF1/Eurosportbet)

    2 = L’indicateur : genre

    genre homme femme total
    Jeux de cercle poker 91 9 100%
    Paris sportifs 92 8 100%
    Paris hippiques 81 19 100%

    ➢ Le genre apparaît comme une variable très discriminante pour les jeux en ligne. Les jeux d’argent en ligne sont très majoritairement pratiqués par les hommes (88%) La gente féminine participe très peu pour l’instant au gambling virtuel (12 %). Elle est nettement sous représentée, par rapport au poids qu’elle occupe dans la société française (51,4%).

    ➢ La tendance apparaît nette, générale même si elle est moins marquée pour les paris hippiques. Il faut donc croire ( même si les explications sont sans doute multiples) que ces jeux ( surtout paris sportifs et poker) renvoient une image particulièrement masculine. Le poker notamment, apparaît essentiellement comme « un jeu d’hommes, un monde d’hommes », un univers de virilité. Nous avions déjà observé fortement cette sur-représentation masculine dans les casinos, aussi bien pour les machines à sous vidéo poker que pour le poker en dur électronique ou non. Le fait que certaines égéries du poker aient été sur-médiatisées ( par exemple Isabelle Mercier, joueuse canadienne surnommée Isabelle « No Mercy ») souligne paradoxalement en réalité, le faible poids et la « minorité » que représentent les femmes dans la population ( nationale et mondiale) des joueurs de poker. Ce constant s’accentue fortement pour les paris sportifs. 31 016 joueurs actifs femmes pour le pari sportif, 64 414 pour le poker.

    ➢ Pour les paris hippiques la situation vis à vis du genre apparaît sensiblement différente. Même si la tendance globale est similaire (81% d’hommes) le « deuxième sexe » apparait largement représenté ( 19 % de femmes, soit 48 255 comptes joueurs actifs détenus par le « beau sexe »). Si le monde du cheval, la filière et pout tout dire le PMU ( qui bataille depuis des années sur ces deux questions : âge et genre) ne semble pas avoir complètement réussi à rajeunir sa clientèle, il semble par contre avoir réussi le pari de la féminiser davantage. Ces chiffres reflètent cette féminisation accrue, qui profite à l’ensemble des opérateurs hippiques et pas seulement au PMU. Traditionnellement associé au Bar PMU, univers masculin populaire de riches sociabilités interlopes mais aussi de fortes promiscuités longtemps enfumés et souvent alcoolisées, les paris hippiques à domicile sur internet ont visiblement attiré les femmes davantage en tout cas que le poker et les paris sportifs virtuels.

    Tri Croisé : age/genre
    N’ayant pas accès aux données brutes la seule donnée correspondant au tri croisé Age/genre correspond à l’information donnée par l’Arjel à savoir « que la population des joueurs en ligne est globalement plus jeune que celle des joueuses quelque soit le type de jeux ».

    3 : Distribution des mises : l’argent joué par les joueurs

    La dernière information donnée par l’indicateur de supervision publié par l’Arjel pour le premier trimestre 2011 est parcellaire. Elle concerne « l’argent du jeu », la distribution des mises engagées par joueur. Cette question sensible pourrait permettre ( si l’information n’était pas parcellaire et les chiffres bruts analysés) de dresser une typologie des joueurs internet selon les risques qu’ils prennent et l’argent qu’ils engagent. Savoir si les joueurs on line jouent beaucoup, peu, s’il y a des gros joueurs, des petits etc.. Et cela bien entendu nous informerait le cas échéant sur le jeu problématique , le nombre de joueurs en ligne potentiellement concerné par le jeu excessif.

    ➢ L’enseignement principal de ces données apparaît assez assez remarquable : 76 % des mises sont jouées par 10 % seulement des joueurs, aussi bien pour le poker que pour les paris sportifs. Plus spectaculaire encore : 1% des joueurs génèrent 51 % des mises pour ces deux types de jeu. Même réduite à cette dichotomie primaire et binaire fournie par le régulateur, l’information apparaît importante. Le marché des paris en ligne – au niveau de l’argent joué – apparaît extrêmement concentré. Une toute petite partie des joueurs apportant l’essentiel du volume d’affaire du gambling virtuel ; un pourcentage microscopique de très gros joueurs ( 1%) fournissant plus de la moitié de l’argent joué

    ➢ Un calcul secondaire effectué par l’Arjel permet de connaître la moyenne jouée « par trimestre » en prenant la base de « plus ou moins 1OO euros » pour les paris sportifs, hippiques et les tournois de poker, et de « plus ou moins 300 euros » pour le poker cash game. Si ce calcul comporte sa part de subjectivité, il permet néanmoins d’établir le tableau suivant ( voir ci dessous) qui sépare les gamblers en deux catégories :
    • une première catégorie de joueurs composée de deux populations. Une population majoritaire( entre 61 et 70 %) qui joue moins de 1OO euros par trimestre, une deuxième population non négligeable ( de 35 à 39 %) qui engagent 100 euros et plus dans les paris sportifs ou dans les tournois de poker
    • une deuxième catégorie qui à l’inverse est composée d’une population de turfistes en ligne qui jouent majoritairement (54%) plus de 100 euros par trimestre

    Type de jeux Pourcentage de joueurs misant moins de 100 euros par trimestre Pourcentage de joueurs misant plus de 100 euros total
    Paris sportifs 61 39 100%
    Paris hippiques 46 54 100%
    Poker ( tournois) 65 35 100%

    • De la même manière la catégorie des joueurs de poker cash game, est composée de deux populations : une – très majoritaire – qui engagent moins de 300 euros par trimestre, une secondaire non négligeable (30 %) qui joue plus

    Type de jeu % de joueurs qui misent moins de 300 euros par trimestre % de joueurs qui misent plus de 300 euros
    Poker cash game 70 30

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    Ces quelques éléments d’analyse, loin d’être exhaustifs, confirment qu’une sociologie du gambling virtuel est possible et nécessaire. Elle informerait objectivement les différents acteurs du champ et éviterait bien des instrumentalisations. Il convient une nouvelle fois de rappeler aux pouvoirs publics que seul un Observatoire des jeux (ODJ) pluridisciplinaire peut réaliser ce travail de recherche. Ce n’est pas le cas actuellement. C’est en travaillant de manière pluridisciplinaire qu’on arrivera le mieux : à connaître « les causes et conséquences » du gambling, à dessiner une typologie objective des joueurs et de leurs comportements, à mieux comprendre la question complexe du jeu excessif. Il convient également de rappeler à l’autorité publique que pour être opérationnel l’ODJ doit posséder des moyens aussi important que ceux par exemple de l’Observatoire des drogues (OFDT) dont le directeur – qui est également membre de l’Observatoire des jeux – vient d’être « remercié » par Etienne Apaire ( Président de la Mildt, la tutelle de l’observatoire des drogues.)

    Quelques mots sur cette actualité, en marge de l’industrie des jeux de hasard et d’argent, mais qui pose un problème commun, en matière de Politique des jeux, en matière de Politique de « lutte contre la toxicomanie ». Quel doit être le rôle d’un Observatoire ? Etienne Apaire vient de répondre en ce qui concerne l’OFDT : « l’Observatoire des drogues est au service des politiques « (3). Notre réponse en matière de jeux sera plus nuancée car la problématique pour l’Observatoire des jeux n’est pas « de lutter contre les jeux de hasard et d’argent ». Nous pensons que la mission première d’un Observatoire c’est…d’observer objectivement, faire des statistiques, des enquêtes de terrain quanti et quali … Sur le registre scientifique l’Observatoire doit donc disposer d’une liberté totale pour comparer, mener à bien ses investigations, établir des corrélations et des rapports de causalité, recouper les sources, émettre des hypothèses pour ensuite les confirmer ou les infirmer. Mais sur le fond nous rejoignons Etienne Apaire. En aucune manière un Observatoire ne doit orienter ( par exemple par des déclarations dans les médias) et encore moins décider d’une politique (des jeux ou des drogues) qui releve de l’autorité. C’est visiblement pour avoir oublié cette règle de base de la décision publique ( nonobstant la soumission légitime à la tutelle) que JM Costes a été remercié. Il s’est prononcé pour les « salles de shoot », alors qu’E. Apaire, le gouvernement – et certainement une très grande majorité de Français – sont contre.

    A suivre car JM Costes reçoit des soutiens de la gauche ( JM Leguen, C. Lemorton), d’associations, d’une partie de la doxa des toxicologues, des médias ( le Monde et Libération en tête) qui mènent depuis des années un curieux activisme en faveur des salles de shoot. Un singulier lobbying en réalité (qui mériterait enquête approfondie pour savoir à qui profite le crime) loin en outre d’être partagé par la totalité des spécialistes en toxicomanie. En aucune manière l’instrumentalisation et la personnalisation de cette affaire ne doit occulter la vraie question qui de notre point de vue est la suivante : la décision, l’orientation de l’action publique ( en matière de jeux et en matière lutte contre la drogue) ne doit-elle pas forcément en final relever de l’autorité politique, garante de l’intérêt général, sous peine d’être systématiquement entravée par des avis, des intérêts privés ou associatifs, qui en outre le plus souvent ne sont même pas représentatifs de l’opinion publique et de plus font débat au sein de la communauté scientifique du champ concerné ? Manifesta haud indigent probatione*

    * l’évidence n’a pas besoin de preuve

    © JP Martignoni , Lyon, France, avril 2011

    notes

    (1) « Opération coup de poing contre le poker en ligne aux Etats-Unis » ( Les Echos du 18 avril 2011)
    (2) « Indicateurs de supervision : données trimestrielles « ( Arjel, 11 avril 2011, 8 pages)
    (3) Maria Poblete : « L’Observatoire des drogues est au service des politiques « : entretien avec E. Apaire ( Président de la MILDT) ( http://www.rue89.com du 16 avril 2011)

  2. Gambling France : Française des jeux, incitation au jeu, jeu responsable, éthique, responsabilité sociale de l’entreprise

    CRESCENDO, CREATIO , MOTS CROISES, MILLE BORNES,2° TIRAGE POUR EUROMILLIONS … : LES MULTIPLES NOUVEAUX JEUX DE LA FRANCAISE DES JEUX

    LA POLITIQUE DE JEU RESPONSABLE DE LA FRANCAISE DES JEUX MASQUE UN ACTIVISME COMMERCIAL FORCENE
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    Jean-Pierre G. Martignoni-Hutin ( sociologue)

    • Après avoir lancé « Crescendo » en novembre 2010 et « 2011 année de rêve » en décembre, la Française des jeux (FDJ) a commercialisé « Mots croisés » en février 2011 et quelques jours après « Créatio », un jeu de grattage disponible uniquement sur internet. Depuis, la FDJ a lancé « Mille Bornes », un jeu qui n’est pas donné par les temps qui courent (5 euros) et elle annonce un deuxième tirage pour Euromillions à partir du 10 mai 2011 alors que le Loto compte déjà trois tirages hebdomadaires (lundi, mercredi, samedi)

    • Christophe Blanchard Dignac ( PDG de la Française des jeux) peut se réjouir, ses équipes marketing font preuve d’une imagination débordante pour lancer en permanence de nouveaux « jeux » et notamment des jeux de grattage. Peut-être faudrait-il d’ailleurs parler de « produits », de « coups marketing » tant l’intérêt ludique de ces jeux paraît parfois restreint. Il s’agit en réalité de faire le plus d’argent possible le plus rapidement possible en jouant, coté joueur sur la tentation du « je vais essayer au moins une fois », coté médias sur « le buzz de la nouveauté. Agences de presse et médias jouent en effet un rôle considérable dans ces lancements en reprenant pro domo les nombreux « communiqués de la FDJ » (nonobstant les budgets publicitaires considérables qui accompagnent ces lancements). Le fait que par ailleurs la FDJ « arrose » en permanence de ses publicités de nombreux journaux ( locaux et nationaux) et organes d’information ( radio, télé), favorise objectivement ce curieux prosélytisme ludique opéré gratuitement par les médias à chaque nouveau jeu de la FDJ. La directrice de la communication de la FDJ (Laetitia Olivier) ne cache pas qu’elle doit jongler entre des métiers très différents dont « influence ( lobby, presse) » ( cité par Stratégie .fr du 27 janvier 2011)

    • L’opérateur historique avait déjà surperformé en 2010 (+5,5 %) en dépassant pour la première fois la barre symbolique des 10 milliards. Avec une telle politique, l’opérateur « publique » atteindra facilement le taux de croissance de 3% qu’il s’est fixé pour 2011 et sans doute le dépassera-t-il. Mais de tels résultats ne tombent pas du ciel. Ils proviennent de « l’activisme commercial » de la FDJ. Christophe Blanchard Dignac court donc le risque de subir des critiques pour « cette incitation au jeu particulièrement prononcée », alors qu’il affiche par ailleurs une politique de jeu responsable.

    • Ainsi, certains esprits chagrins pourraient accuser le PDG de la Française des jeux de surfer et même d’exploiter sans vergogne une crise économique qui perdure. Les Français en grande difficulté financière cherchant plus que jamais à « décrocher le pactole » pour « changer de vie » , « se refaire », ou tout simplement pour essayer « d’améliorer l’ordinaire ». Un ordinaire de plus en plus affecté par l’augmentation des prix, la dépression économique mondiale, l’ imposition fiscale locale et nationale en perpétuelle augmentation ; sans oublier l’arrivée inflationniste de l’Euro dont nos concitoyens ne se sont toujours pas remis. Conscient de cette situation ( parfois dramatique pour les catégories populaires et désormais aussi pour les classes moyennes) CB Dignac exploiterait sans le dire, la théorie de la pauvreté de certains économistes spécialisés dans le gambling : plus on est pauvre plus on joue.

    • D’autres pourraient soupçonner le « patron » de la Française des jeux de n’avoir guère l’esprit public, de ne pas avoir le sens de l’intérêt général, mais d’agir en réalité, comme « la pire des entreprises privées », exploitant jusqu’à la corde dans une vision courtermiste, un précieux patrimoine ludique national qui ne lui appartient pas, contribuant ainsi à « tuer la poule aux œufs d’or » de Bercy, tout en piétinant sans vergogne un « principe de précaution » longtemps instrumentalisé pour freiner l’ouverture à la concurrence et combattre les directives européennes. Même si elle a depuis retourner sa veste ( et d’une belle manière) la FDJ a longtemps mis en avant sa politique de jeu raisonnable et responsable pour tenter de prouver que la meilleure façon de lutter contre le jeu pathologique était de maintenir le monopole, qui existe encore en matière de loteries et de jeux de grattage.

    • Mais c’est justement sur ce terrain du jeu responsable, du jeu pathologie maladie, de la responsabilité sociale de l’entreprise Française des jeux (RSE), que Christophe Blanchard Dignac pourrait en final être montré du doigt, mis en accusation et en contradiction, et cela sur trois registres

    1/ Le premier concerne la « dangerosité » des jeux que vend l’opérateur historique à travers un réseau très dense de distributeurs (35800) Le chercheur Jörg Häfeli a établi « un instrument d’évaluation du potentiel de dangerosité des jeux de hasard et d’argent » (1) Parmi les critères qui le définisse on trouve notamment :
    ➢ Le critère de disponibilité : la probabilité accrue de développer un comportement de jeu problématique est directement lié à la disponibilité d’un jeu
    ➢ Le critère du degré d’interactivité : dans certains jeux « le joueur est émotionnellement impliqué », » il vit à fleur de peau la façon dont se prépare l’issue du jeu » . J. Häfeli précise « on observe cela pour les loteries dont le tirage s’effectue en direct à la télévision «
    ➢ Le critère de mise sur le marché : une mise sur le marché à grande échelle entraine une banalisation du jeu. Cette normalisation favorise l’excessivité. La routine se substitue à la réflexion critique précise par ailleurs deux autres chercheurs Meyer & Hayer ( 2005)
    ➢ Le critère de l’anonymat : le potentiel de risques de jeu excessif s’élève avec le degré d’anonymat d’un jeu car le joueur ne craint aucune stigmatisation. L’anonymat supprime l’effet modérateur du contrôle social induit dans le fait de déclarer son identité, comme par exemple quand on joue dans un casino. En outre cet anonymat rend plus difficile la prévention, précise J. Häfeli.

    Contre toute attente on s’aperçoit que ces critères correspondent exactement aux caractéristiques des jeux de la FDJ, notamment des loteries et des jeux de grattage. Les jeux de l’opérateur historique possèdent objectivement un potentiel addictogène important et ne correspondent pas à une offre « douce ». A l’avenir et notamment si l’Observateur des jeux fonctionne comme un véritable Observatoire scientifique et non comme une simple Commission ( voir ci-dessous), la FDJ devra faire avec des instruments d’évaluation objectifs et ne pourra plus définir elle même la dangerosité ou l’innocuité de ses produits. Les jeux considérés comme les plus dangereux étant avant tout dans l’imaginaire du joueur freudien véhiculé par la doxa du jeu pathologie maladie ( financée par la FDJ), les jeux de casino (roulette, black-jack, machines à sous, poker) et les paris hippiques.

    2/ Le deuxième registre concerne plus largement les études sur le jeu. La Française des jeux essaie depuis deux ans ( avec une accélération depuis la libéralisation des jeux en ligne) de verrouiller entièrement le volet « recherche sur le jeu pathologique ». Elle finance le centre du jeu excessif de Nantes à hauteur de deux millions d’euros sur 8 ans, soit la bagatelle de 13,11 millions de nos bons vieux francs. La FDJ est le « partenaire fondateur » du centre de Nantes. Ce n’est pas pour rien et ce n’est pas hasard qu’elle a fondé ce centre, auto proclamé centre de référence sur le jeu excessif. Sans la FDJ il n’existerait pas. La Française des jeux vient par ailleurs soudainement de verser 270 OOO euros à deux universités parisiennes pour verrouiller un volet plus large gambling & sciences sociales. Christophe Blanchard Dignac instrumentalisant à cette occasion certaines conclusions de l’expertise Inserm, qui invitaient les pouvoirs publics ( et non les opérateurs !) à mener des recherches sur les jeux d’argent et à installer un Observatoire des jeux. La également les circonstances et les raisons de ce « financement parisien » soudain sont loin d’être clairs. Ne parlons même pas de l’enquête sur « le caractère addictif des jeux en ligne » réalisée par MM. Ladouceur/Lejoyeux à Bichat et financée également par la FDJ. Les conflits d’intérêts semblent se cumuler dans le champ ludique vu que Michel Lejoyeux fait partie dans le même temps de la Commission n° 1 de l’ARJEL. Quant au psychologue cognitiviste Robert Ladouceur ses rapports incestueux avec Loto Québec ( qui se chiffrent en millions de dollars canadiens) ont été dénoncés depuis des lustres ( 2) et les résultats de ses études sur le jeu pathologique ont été critiqués. Il y a bien au niveau de la recherche sur le jeu la mise en place par Christophe Blanchard Dignac d’un « Plan B », sans Comite consultatif du jeu et sans Observatoire. La Française des jeux finançant la quasi-totalité des études en cours sur les jeux d’argent, nonobstant « sa commande à l’AFNOR », visant à auto définir la notion de « jeu responsable » pour mieux la contrôler. Toutes ces actions et tout cet argent engagé par l’opérateur des loteries ont pour but de cour-circuité l’Observatoire des jeux, avant même que celui ci ne soit installé et sans doute même au départ pour qu’il ne soit jamais installé. La FDJ est bien entendu en conflit intérêts jusqu’au cou dans cette affaire. Christophe Blanchard Dignac continue avec de gros moyens financiers son travail de verrouillage pour occuper tout le terrain : financement de la doxa du jeu pathologie maladie, communication permanente, instrumentalisation des agences de presse et donc des médias sur la question du jeu responsable… On est visiblement face à un plan stratégique parfaitement concerté. Certes depuis le 11 mars 2011 l’Observatoire des jeux (ODJ) a été installé. Mais sa composition semble pour l’instant confirmer les craintes que nous avons exprimées dans différentes contributions ( 3 ). A savoir que les que les pouvoirs publics cèdent à la tentation de mettre en place de manière délibérée un Observatoire « croupion » Actuellement ( la qualité des personnes n’est pas en cause) l’Observatoire des jeux ressemble davantage à une Commission, à un COJER bis, qu’à un Observatoire scientifique des jeux de hasard. Chacun en conviendra. L’ODJ apparaît en outre strictement mono-disciplinaire et centré uniquement sur le jeu pathologie maladie. Pour remettre les compteurs à zéro en matière de recherches sur le jeu il aurait fallu dès le départ ( et après plus d’un an d’une curieuse attente !) doté l’observatoire de moyens qui soient à la hauteur des enjeux scientifiques et statistiques du secteur, c’est à dire avec un budget au moins aussi important que celui de l’Observatoire des drogues. Au lieu de ça « le cabinet » nomme Jean Michel Costes à l’Observatoire des jeux ( la également la qualité, et en l’occurrence vu le cumul des fonctions, les nombreuses qualités de la personne ne sont pas en cause) qui est déjà… directeur de l’Observatoire des drogues.
    3/ Nous l’avons vu la FDJ en fait beaucoup en matière de jeu responsable mais elle en fait sans doute trop. Et cela nous permet d’aborder le troisième registre sur lequel le PDG de la Française des jeux pourrait être mis en contradiction, voire en accusation. Nous pensons que cet engagement en matière de RSE cache une autre réalité. La politique jeu responsable de Christophe Blanchard Dignac serait beaucoup moins éthique qu’elle veut bien le dire, elle aurait pour fonction de cacher un activisme commercial & marketing forcené. La FDJ met en avant depuis deux trois ans une politique des jeux raisonnable, « finance ses ennemis » (les anti jeu de la doxa du jeu pathologie) pour mieux les contrôler mais dans le même temps se lance dans une course effrénée à la croissance, jamais vue depuis sa création. En final la politique éthique mis en œuvre par CB. Blanchard Dignac aurait pour conséquence en réalité – sous couvert d’une action visant à lutter contre le jeu excessif et le jeu de mineur – de produire plus de jeu. Habile stratège le patron de la FDJ aurait profité du débat sur le jeu pathologique, de l’inquiétude des pouvoirs publics en matière de santé publique, non pas pour mettre la pédale douce en matière de développement mais au contraire pour accélérer sa croissance tout azimut.
    Si notre hypothèse se vérifiait cela voudrait dire que la politique de jeu responsable mis en œuvre par CB Dignac des deux dernières années va produire en final… du jeu pathologique ! Les meilleures preuves de cette démonstration se situent dans les résultats de l’opérateur de loteries. Si la FDJ a réussi contre toute attente en pleine crise économique à augmenter son CA c’est parce qu’elle a très fortement boosté son offre de jeux en ligne et surtout en dur et qu’elle continue à le faire à marche forcée ( voir début de l’article). Dans une moindre mesure un phénomène similaire a été observé pour le PMU à tel point que certains joueurs s’inquiètent désormais pour savoir si on n’a pas atteint un point de saturation en ce qui concerne le nombre de courses en France. (4) Cette très forte augmentation de l’offre du PMU a été signalée par Hubert Monzat ( directeur de France Galop) lors du colloque du 22 mars dernier à la Maison de la Chimie ( 5)
    ——
    Certes certains pourront considérer que le PDG de la FDJ – responsable mais pas coupable – n’est après tout qu’un grand commis de l’Etat qui fait très bien son travail et remplit avec zèle les caisses du Trésor Public. Reste à savoir de quelle marge de manœuvre CB Dignac a disposé dans cette affaire et si elle n’a pas été trop grande justement. Reste à savoir si la politique des jeux de la France doit se décider à Bercy ou dans la forteresse de Boulogne (siège de la FDJ). Reste à savoir si les excès de zèle du patron de la FDJ et de ses équipes, sa politique expansionniste, sa boulimie ne sont pas en contradiction avec la Politique des jeux responsable affichée par le gouvernement depuis quelques années, et inaugurée par Nicolas Sarkozy avec les casinos quand il était Ministre de l’Intérieur ( notamment mise en place d’un contrôle aux entrées obligatoire pour les machines à sous). Dans tous les cas de figure en termes de santé publique et de RSE, l’effet boomerang serait terrible pour les pouvoirs publics. Ils seraient accusés d’incompétence, pire de duplicité.
    D’autres considèreront que ce n’est pas un problème de personne et que les vraies questions sont les suivantes : « L’industrie des jeux de hasard et d’argent est elle compatible avec les notions de jeu responsable et de développement durable ? « ( Martignoni 2010), « Comment réussir à concilier une politique responsable de développement des activités de jeux ? » ( Peano 2010) « L’éthique dans l’industrie du jeu, quels enjeux et quelle crédibilité ? « (Massin 2010) , « La gestion des jeux de hasard et d’argent : une perspective éthique ? « (6) Ces problématiques, certains chercheurs spécialisés dans le gambling les posent depuis longtemps. La puissance publique pourrait s’en inspirer. Quant à la question du financement par l’industrie du jeu de la recherche sur le jeu excessif (une convergence d’intérêts primaires qui entraîne un conflit intérêts que la Française des jeux connaît bien) la également les chercheurs ont travaillé la question (Hurst, Mauron , 2010) (7) Monsieur Blanchard Dignac pourrait peut être également s’en inspirer. Potius sero quam numquam*

    © JP Martignoni , avril 2011

    * Mieux vaut tard que jamais

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    Notes
    (1) Jörg Häfeli : « Un instrument d’évaluation du potentiel de dangerosité des jeux de hasard et d’argent » (75-91) In C. Dunand, M. Rihs-Middel, & O. Simon (Eds.), Prévenir le jeu excessif dans une société addictive : D’une approche bio-pscho-sociale à la définition d’une politique de santé publique. Genève : Éditions Médecine & Hygiène., 2010

    (2) Pierre Desjardins : « Le livre noir de Loto Québec « ( Les intouchables Montréal, Québec, 2003)

    (3) JP Martignoni : « Il ne faut surtout pas que l’Observatoire soit un Observatoire croupion »* (IGAmagazine n°9, avril 2011, 42-45) ; Communiqué sur l’observatoire des jeux de hasard et d’argent annoncé par un arrêté du 11 mars publié au journal officiel ( 13 mars 2011) ( 2 pages, 21 mars 2011)

    (4) Isabelle Toussaint : « Hippisme : trop de courses tue les courses « ( dépêche AFP du 12 mars 2011)

    (5) « Les jeux d’argent en ligne : un an après son adoption quelle mise en œuvre de la loi sur la libéralisation des jeux d’argent en ligne « (Colloque Agora Europe organisé par JF Lamour et F. Trucy, Paris, Maison de la Chimie, 22 mars 2011)

    (6) JP Martignoni : L’industrie des jeux de hasard et d’argent est-elle compatible avec les notions de jeu responsable et de développement durable ? : intérêts, contradictions et enjeux » ( 226-232) Valérie Peano : « Comment réussir à concilier une politique responsable de développement des activités de jeux avec une industrie globale de plus en plus performante ? (233-237) Sophie Massin : « « L’éthique dans l’industrie du jeu, quels enjeux et quelle crédibilité ? « (213-218)Magali Brodeur : « La gestion des jeux de hasard et d’argent : une perspective éthique ? « ( 219-226) Ces quatre article se trouvent dans l’ouvrage collectif : C. Dunand, M. Rihs-Middel, & O. Simon (Eds.), Prévenir le jeu excessif dans une société addictive : D’une approche bio-pscho-sociale à la définition d’une politique de santé publique. Genève : Éditions Médecine & Hygiène., 2010

    (7)Samia A. Hurst, Alex Mauron : « Financement industriel de la recherche et conflits d’intérêts », (241-248) ibid. : C. Dunand, M. Rihs-Middel, & O. Simon (Eds.), Prévenir le jeu excessif dans une société addictive : D’une approche bio-pscho-sociale à la définition d’une politique de santé publique. Genève : Éditions Médecine & Hygiène., 2010

  3. GAMBLING :France

    Le centre du jeu excessif, financé par la Française des jeux organise, un congrès à Nantes sur l’addiction

    Conflit d’intérêts dans l’univers du jeu

    Par Jean-Pierre G. Martignoni-Hutin ( sociologue)
    ——

    « Addict aux jeux vidéo ?, Accro au sport ? Toxico de la bouffe ? Drogué aux jeux d’argent ? » tel est le programme du congrès organisé par le centre du jeu excessif qui se déroulera à Nantes du 6 au 8 octobre 2010 . Autant dire que le CRJE du CHU de Nantes ( auto proclamé Centre de Référence sur le jeu excessif) ratisse large. Il faut bien assurer des relais de croissance aux addictologues. Ce Centre doit en outre dépenser les millions d’euros offerts sur un plateau par la FDJ et dans une moindre mesure par le PMU. Ce financement ( et les curieuses circonstances politiques dans lesquelles il a été décidé, nonobstant les réseaux d’influence activés) entraîne bien un « Conflit d’intérêt dans l’univers du jeu » comme le précise Claire Legros journaliste dans l’hebdomadaire La Vie. Nous avons souvent dénoncé ce scandaleux conflit d’intérêts mais nos propos ont rarement été repris par la presse – nationale ou régionale – souvent bénéficiaire de la publicité de la FDJ.

    Alors quelques millions d’euros pour instrumentaliser et enfumer la question ( très sensible pour l’opérateur historique) du jeu pathologie maladie, c’est un pactole pour le CHU de Nantes, mais peu pour la FDJ qui a réalisé 10 milliards de CA en 2009 et qui vient d’investir 25 millions d’euros pour lancer Amigo , un « nouveau » jeu de tirage quasi permanent.

    Et c’est là qu’on voit l’omnipuissance de la FDJ et de son PDG Christophe Blanchard Dignac à qui on peut appliquer la formule : » Ils se croient tout permis et ils se permettent tout !» Quelques jours après avoir lancé Amigo à Lille ( dans une région très joueuse, c’est l’argument avancé par la FDJ, mais également une région avec beaucoup de chômage et de problèmes économiques) , la FDJ finance un congrès sur le jeu addictif. Le CRJE de Nantes dans sa plaquette de présentation du colloque ne précise pas combien elle touche des deux opérateurs historiques mais mentionne à propos de la Française des jeux et du PMU : « Ils soutiennent notre action », « Ces industriels du jeu sont présents pour échanger sur les initiatives mises en place au profit de la protection du consommateurs «

    Depuis plusieurs mois la FDJ et C Blanchard Dignac pratiquent systématiquement le double langage et un discours contradictoire avec une naïveté consternante. Mais en l’absence de médias critiques, ça marche. La presse ( qui bénéficie souvent de la publicité permanente de la FDJ) se contentant souvent de reprendre mot pour mot les dépêches AFP , qui reprennent elles-mêmes pro domo les nombreux communiqués de la FDJ et les vérités (subjectives) de son PDG.

    La FDJ a engagé 25 millions d’euro pour lancer Amigo, un jeu quasi permanent à très haute fréquence de tirage, plus cher que le Rapido et avec un plus gros pactole. C’est bien pour booster son CA et attirer de plus en plus de clients ( notamment des jeunes et des femmes précise tranquillement Christophe Blanchard Dignac) Mais dans le même temps le PDG avec la complicité de la presse ( notamment France-Soir du 5/IO ) sert un beau discours sur le jeu responsable, la lutte contre l’addiction et même la fermeture des bars. Amigo sera moins addictif que Rapido, sera convivial et permettra de redynamiser les cafés affirme Patrick Buffard , responsable marketing. Le PDG de la FDJ a même embauché une « psychosociologue » pour mieux vendre Amigo. Il faut savoir que cette consultante dirige un petit cabinet spécialisé dans le marketing et le conseil stratégique (Mimesis)

    Idem pour les jeux en ligne ou la FDJ a investi des millions d’euros ( « nous sommes bien partis pour atteindre 25% des parts de marchés en 2012 » précise CB Dignac dans France Soir du 5 octobre) et dans le même temps finance une étude sur le caractère addictogène des jeux, réalisée par un psychologue et le canadien psycognitiviste Robert Ladouceur, qui sera bien entendu présent à Nantes à grand frais, pour faire rire l’assistance et montrer de manière simpliste que les joueurs sont des idiots mais pour finalement servir sur un plateau le discours souhaité par la FDJ sur le jeu pathologie maladie. Qui saura dans l’assistance que M. Ladouceur a eu un procès en déontologie et a été beaucoup critiqué dans la Belle Province pour les millions de dollars canadiens qu’il a reçus de Loto Québec pendant 20 ans

    Alors bien sûr on parlera certainement de jeu responsable à Nantes notamment à la table ronde « Jeux responsable, des intentions aux actes » Mais la également l’opérateur historique ( qui décidemment a du mal à changer ses habitudes ) cherche à tout contrôler et a tout instrumentaliser. Il vient de commander à l’AFNOR une étude pour définir et normer la notion de Jeu responsable. Et comme le précise le cahier des charges de l’AFNOR : « la réglementation relève des pouvoirs publics, son application est imposée, les normes ont un caractère volontaire, s’y conformer n’est pas une obligation «

    Souhaitons vivement que les autorités politiques et de régulation en charge du dossier gambling, et qui seront représentées au congrès de Nantes, annoncent enfin l’installation de la nouvelle architecture du paysage ludique ( comite consultatif du jeu, observatoire des jeux, commissions) prévue par la loi sur les jeux en ligne. Cela évitera à la FDJ de continuer à jouer le drôle de jeu et le double jeu qu’elle pratique depuis plusieurs mois. Après l’Arjel qui continue avec succès sa mission, il est grand temps que les politiques reprennent la main dans la perspective de la clause de revoyure, et afin d’éviter à l’opérateur historique de faire constamment le grand écart et d’être en conflit d’intérêts

    © Jean-Pierre G. MARTIGNONI-HUTIN ( sociologue)
    Lyon, France, Université Lumière, Lyon II, GRS, Octobre 2010

  4. Jeux en ligne, jeu excessif, conflit d’intérêts

    L’Autorité de régulation des jeux en ligne ( Arjel) vient de délivrer ses premières licences pour les jeux d’argent en ligne : une étape importante dans la mise en place d’une Politique Des Jeux cohérente qui doit cependant éviter les conflits d’intérêts par exemple en ce qui concerne le jeu excessif

    L’Arjel vient d’attribuer ses premiers licences à une vingtaine d’opérateurs qui pourront exploiter les jeux d’argent sur Internet, dans un premier temps les paris sportifs et ensuite le poker. C’est l’aboutissement d’un long processus. La loi relative « à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent ligne » a été votée à L’Assemblée Nationale le 6 avril 2010. Cette date marquera l’histoire des jeux en France. Elle constitue une étape importante dans la mise en place d’une Politique Des Jeux cohérente, qui supprime les conflits d’intérêts. Certes, il y a eu des incidents de séance, des accusations politiciennes ( « les amis du Fouqet’s) et des joutes rhétoriques qui relèvent du pur jeu parlementaire. Mais l’essentiel n’est là. Députés et sénateurs ont beaucoup travaillé, comme en témoignent les milliers de pages des débats parlementaires. Les enjeux politiques, culturels et sociaux de cette légalisation ont été soulignés. C’est ce que l’histoire retiendra. Même s’il y a un important « dessous des cartes » dans ce dossier, c’est tout à l’honneur de la France – pays qui possède une histoire ludique riche et ancienne – d’avoir pris le temps d’organiser ces débats. La France n’est pas une république bananière. Il faut remonter à 1933 – instauration de la loterie nationale moderne – pour retrouver des échanges parlementaires aussi passionnés sur les jeux de hasard et d’argent. La question du jeu excessif, celle du jeu des mineurs et des personnes vulnérables, a été au centre de ces débats. Une nouvelle architecture souhaitée par les parlementaires – et notamment par les sénateurs – a été mise en place pour traiter ces problématiques. Elle booste le Comité Consultatif des Jeux (CCJ), lui adjoint un observatoire des jeux (ODJ), deux commissions spécialisées et coordonne son action avec l’Arjel, l’autorité de régulation dirigée par Jean François Vilotte. La représentation nationale a semble t il compris qu’une saine régulation doit s’appuyer sur la recherche et l’expertise, séparer les compétences, si elle ne veut pas être accusée d’être partisane ou sous la pression des opérateurs ou d’autres acteurs du champ . La légalisation des jeux d’argent sur Internet ne peut en effet que renforcer l’acuité des questions sociétales qu’entraîne l’économie du hasard , (conséquences sociales , santé publique…). Comme ces problématiques (et notamment la question du jeu «excessif ») ont largement été mises en avant pour justifier l’ouverture « maîtrisée » des jeux en ligne, il convient que les conséquences du gambling ne soient pas instrumentalisées. En aucune manière les opérateurs de jeux ne peuvent diligenter et financer des recherches sur l’impact de leur activité comme c’est le cas actuellement. La Française des Jeux vient d’annoncer le renouvellement du financement du centre du jeu excessif de Nantes (CRJE) à hauteur de 1,25 millions d’euros, qui avait déjà touché 3 millions d’euros ( de la FDJ et du PMU) lors de création en 2007 ! Dans le même temps elle finance une étude sur « l’évaluation du caractère addictogène des jeux en ligne» à l’hôpital Bichat. Cette recherche sera notamment réalisée en collaboration avec Robert Ladouceur, psychologue très controversé au Québec et au Canada pour ses « rapports» avec l’industrie des jeux. Ces relations jettent un doute sur la fiabilité des études qui vont être réalisées et entraîne un conflit d’intérêt intolérable. Visiblement la Française des jeux n’a pas compris que les choses sont en train de changer. Elle tente de contrôler entièrement l’information médiatique et « scientifique » sur l’impact de son activité avant que ne se mette en place l’observatoire des jeux. Sous l’autorité du Comite Consultatif des jeux , l’observatoire des jeux doit donc jouer un rôle central dans les recherches sur l’impact du gambling en ligne et en dur pour éviter de tels conflits. A l’heure ou certains questionnent le rôle ambigu joué par les experts dans d’autres dossiers (réchauffement climatique, grippe A H1N1, tabagisme passif…) il convient donc que l’observatoire des jeux possède les moyens de ses ambitions, afin de réaliser des mesures scientifiques et des recherches pluridisciplinaires indépendantes. Si l’Etat a le courage de jouer franc jeu dans ce dossier, il sera gagnant au bout du compte et évitera bien des critiques, contentieux et polémiques ultérieures.

    Jean-Pierre M, sociologue.
    Lyon (France)
    16 juin 2010

  5. Jeux en ligne / jeu excessif : attention aux idées reçues… et aux conflits d’intérêts

    1 = Les sites de paris en ligne sont-ils dangereux ?
    Pas plus que les autres jeux d’argent. Après la roulette, les machines à sous, le Rapido, les jeux de grattage, les jeux en ligne sont présentés comme les nouveaux démons de l’enfer du jeu par la doxa du jeu pathologie maladie. En réalité le jeu et son support sont neutres. Sans joueur, pas de jeu. C’est le joueur qui donne sens au jeu comme l’a démontré le philosophe Jacques Henriot. Les pratiques ludiques excessives ne viennent pas du jeu lui-même ou de son support mais de la biographie et de l’histoire du joueur. Par contre bien entendu le jeu peut mettre en lumière des problèmes sociaux ou personnels, financiers ou conjugaux par exemple.

    2 = Vous refusez de parler de joueur pathologique…
    Je préfère le terme jeu problématique qui apparat plus neutre d’un point de vue épistémologique. Je conteste la doxa scientiste du jeu pathologie maladie fortement en conflit d’intérêts dans cette affaire. Les études sur le jeu excessif (souvent contradictoires) prétendent qu’il y aurait entre 1 et 3% de joueurs addicts. Drôle de fourchette qui varie du simple au triple et permet toutes les manipulations. Sommes-nous ici dans la rigueur scientifique ou dans le lobbying. Plus globalement dans notre société du care ( soin mutuel), certains médicalisent des pratiques sociales et culturelles notamment quand elles sont excessives, pour se donner bonne conscience ou pour faire de l’argent ( ici le business du jeu compulsif). Cette collusion d’intérêts est hypocrite et scandaleuse.

    3 : L’approche médicale pour parler du jeu et de son environnement convient-elle ?
    Il manque une approche socio-antropologique, économique, historique… une approche pluridisciplinaire du jeu, qui est une passion humaine ancestrale, un fait social et culturel avant d’être une pathologie. Il y a en effet danger à aborder les jeux d’argent à travers la problématique de l’addiction, car une fois acceptée comme entité morbide individualisée, les jeux de hasard sont analysés comme des formes plus ou moins graves de jeu pathologique

    4 : Contestez-vous le fait qu’il y a des personnes chez qui le jeu pose problème ?
    C’est une évidence que toute pratique excessive peut être dangereuse, dans le jeu comme ailleurs et effectivement des sujet joueurs jouent beaucoup. Mais rien ne prouve que le jeu lui-même soit la cause originelle de cette excessivité, et rien n’indique que l’excessivité soit forcément synonyme de pathologie. Par ailleurs je conteste avec d’autres chercheurs internationaux, la vision d’un joueur désocialisé, forcément seul devant sa machine à sous ou désormais seul devant son ordinateur pour flamber en ligne dans une posture onanistique. Dans les casinos socialités et sociabilités sont nombreuses. On peut facilement engager la conversation, faire des rencontres. Idem pour les jeux d’argent sur Internet ou de nombreux sites existent autour du poker .

    5 : Précédemment, il fallait se déplacer dans des casinos ou au café pour jouer à des jeux d’argent. Avec Internet, les tentations vont être à portée de main, directement au domicile des joueurs…
    Arrêtons à nouveau d’enfoncer des portes ouvertes, permanence et proximité sont les principes d’Internet ! La légalisation des jeux en ligne va réduire la distance entre le jeu et le joueur et cela va faciliter la vie des joueurs qui ne souhaitent pas ou ne peuvent pas se déplacer . Mais bien entendu il faut faire de l’information prévention, notamment en direction des mineurs et des personnes vulnérables. Mais avant de mettre en œuvre des mesures par trop liberticides, il faut prendre le temps de faire des études sociologiques sur les pratiques ludiques des internautes et la socialisation ludique contemporaine. C’est au Comite Consultatif des jeux et à l’Observatoire des jeux de faire cela. Pas besoin de construire une usine à gaz, comme actuellement, ou la doxa du jeu pathologie maladie et les opérateurs de jeu verrouillent en réalité le dossier pour contrôler entièrement l’information médiatique et scientifique sur le jeu excessif

    6 : Les casinos et opérateurs en ligne font-ils assez de prévention ?
    Il y a déjà pas mal de prévention, notamment dans les casinos en dur, mais est-ce vraiment aux opérateurs de faire de la prévention et surtout est-ce leur role de mesurer l’impact de leur activité, comme le fait actuellement la Française des jeux en finançant le centre du jeu excessif de Nantes et d’autres études. Le conflit d’intérêt est grossier et scandaleux. Plus globalement cela vaut aussi pour l’Etat Croupier qui ne peut pas dans le même temps exploiter le gambling et à établir les règles en matière de responsabilité, de protection, de taux de redistribution…

    7 : Que préconisez-vous alors pour limiter les risques?
    IL faut mesurer ces risques avant de les limiter. Par ailleurs il faut favoriser la concurrence et développer un consumérisme ludique. Je préconise la création d’une autorité de régulation unique et indépendante, à l’image de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Pour l’aspect recherche/expertise il faut installer rapidement et faire fonctionner l’observatoire des jeux, prévu par la loi sur les jeux en ligne.

    JP M, sociologue,
    15 juin 2010